CLAP - 38 Bobines
Extrait de « MISE À SAC »
(...) Maintenant juste par souci d'humanité je peux communiquer, à quiconque m'en ferait la demande, une copie du jugement qui fait jurisprudence concernant le droit de pouvoir utiliser les sacs gigognes autant qu'on veut et dans le sens qu'on veut (du plus petit au plus grand - c'est plutôt ça la coutume qui répondrait à une certaine logique) mais aussi, et là mon avocat m'a bien défendue, dans le sens inverse : le grand dans le moyen et le tout dans le petit, pour une simple nécessité de gain de place, c'est quand même malheureux qu'il faille légiférer pour des choses pareilles :
À quand une loi pour dire dans quel sens on doit s'habiller ? d'abord les chaussettes aux pieds et puis en remontant ? ou bien d'abord le chapeau sur la tête et en descendant ? Bonjour la République ! (...)
Article paru dans "levure littéraire" - magazine international d'information et d'éducation culturelle (n°13)
Recension de Claude LUEZIOR
CLAP 38 BOBINES - Éd. France Lilbris, 2017
Voilà donc un ouvrage désopilant, souvent incisif, parfois poétique. Au gré de trente-huit brefs récits, Jeanne Champel Grenier, dont on connaît les talents chromatiques d'artiste-peintre, nous entraîne dans son monde imaginaire, bien qu'on la suspecte de s'enraciner dans un terroir aux mille et une facettes. L'histoire du chat pouilleux mangeant dans une porcelaine Ming, par exemple, est très bien construite, avec une chute qui nous a fait rire à haute voix. Celle du personnage ayant la phobie du chiffre 3 est tout aussi originale.
L'auteur a un réel talent pour la description d'un bric-à-brac, d'une braderie, d'un intérieur envahi par des objets absolument indispensables pour sa propriétaire. La scène d'un énergique élagage domestique fait tout autant preuve de surabondance factuelle que verbale et vaut son pesant d'or. Comme si l'écrivain nous faisait part à la fois d'un vécu et... de fantasmes à haute voix.
Avec un langage spontané, presque oral mais tout à fait assumé, Jeanne Champel Grenier (dont le dernier patronyme cadre bien avec la truculence de ses expressions qui fleurent bon les souvenirs) crée cette immédiateté qui l'attache d'emblée aux lecteurs et qui crée sans nul doute une vraie complicité. Au-delà des calembours, d'interjections savoureuses et d'expressions populaires, elle bâtit ainsi une communion avec le rêve qui n'est pas sans nous faire penser à Pagnol, Daudet et Audouard. Un César sourcilleux et emphatique ou un Tartarin prolixe semblent dîner à sa table (l'un des textes s'appelle d'ailleurs "Tartarin").
C'est qu'on est dans le Sud de la France (au début du Sud, là où s'exercent déjà les cigales, mais notre conteuse, mâtinée de gênes catalans, a de la famille à Marseille, ce qui ne s'invente pas), dans une civilisation enchantée par la tradition du dire : histoires rocambolesques, clins d'œil à un quotidien magnifié où exagérations en disputent aux galéjades et aux rouspétances de bon aloi. Distance salvatrice qui fait vivre la réalité dans une dimension tierce : celle de l'humour mais aussi d'un amour dilaté, sans limite, pour des choses minuscules mais surtout pour des êtres en majuscules.
Claude Luezior
Recension de Nicole HARDOUIN : CLAP 38 BOBINES-Éd. France Libris, 2017
Certains rient jaune quand ils sont verts de peur, d’autres émettent des rires gras même lorsqu’ils n’ont que la peau sur les os, ou pas de peau du tout, mais oui, les soirs de pleine, lune prêtez donc l’oreille aux fantômes. À moins que ce ne soit le rire des étoiles ; c’est peut-être pourquoi Jeanne Champel Grenier a mis en exergue de son recueil cette épigraphe de Boris Pasternak : « Il siérait aux étoiles de rire aux éclats. Mais quel trou retiré que ce monde. »
Ce recueil d’histoires courtes : Clap 38 Bobines est un ciel étoilé qui troue la morosité. D’une écriture vive, spontanée, Jeanne Champel Grenier jongle avec les mots, joue avec les phrases, elle les triture, les écartèle et les pages deviennent des verres lumineux qu’elle caresse, tourne, retourne, tout miroite et se casse en mille éclats… de rire évidemment, nous pensons ici à certaines chutes qui sont hilarantes, celle par exemple du chat et de "la porcelaine Ming", de Marie Antoinette.
Comment ne pas éclater de rire en tournant les pages et ce ne sont pas des rires polis, pincés, ce sont certes des modulations différentes, le rire, tout comme notre auteur, aime se travestir sous des tonalités différentes, il fait ses gammes en accords tonitruants, discrets, légers, en badinant avec les voyelles, voire parfois en éclats de larmes.
Même lorsque l’auteur embarque son lecteur dans un début d’histoire qui pourrait paraître noire, nous songeons à "Lazare", à l’enterrement de Gustin et du "Coup de chapeau", qui à priori ne devrait pas porter à l’hilarité, et bien par des pirouettes dont elle a le secret, des jeux de mots, désarçonné on ne peut que rire tant l’inattendu est un torrent d’humour.
Ce recueil est un joyeux tohu-bohu, ce qui est à la cave peut voyager dans les sous-pentes, certains objets qui auraient leur place dans la maison se retrouvent étrangement à l’extérieur, les sages semblent dérangés, les fous argumentent avec la vivacité d’une normalité évidente, un superstitieux jongle avec le chiffre trois pour l’éviter, mémorable aventure que "Jamais deux sans trois". Avec une rare habileté J. Champel Grenier remet tout en ordre, pas toujours là où le lecteur s’y attend, c’est ce qui fait le sel, le sucre et le safran, ("Il arrive qu’on se demande") de cette amusante et gouteuse cuisine méridionale. Ce qui n’exclut pas des moments de tendresse comme "Venise N°16" ou "Le Cabras".
C’est pourquoi nous proposons que les autorités pharmaceutiques nationales compétentes délivrent à Jeanne Champel Grenier une A.M.M (Autorisation de Mise sur le Marché) afin que ce recueil puisse être vendu en pharmacie pour soigner les déprimés, les moroses, pour redonner au moins le sourire à un monde qui en besoin ; le sourire étant l’humilité du rire.
Prescription : quelques bonnes heures de Clap 38 Bobines c’est le bonheur assuré.
Bien évidemment interdiction de générique ; la source pure, le princeps de J.Champel Grenier.
L’illustration de la première de couverture a été réalisée par l'auteur qui est aussi artiste-peintre.
Nicole Hardouin
Recension de Louis DELORME : CLAP 38 BOBINES-Éd. France Libris, 2017
Pour l'écrivain la nouvelle est un genre difficile. Il s'agit, en un nombre restreint de pages, de captiver et de régaler le lecteur. C'est quelque part un tour de force qui doit être mené rondement. Vite fait, bien fait. Et avec du style. A mon sens, le style est même essentiel. Alerte, humoristique, enlevé, précis, réaliste, avec une historiette qui tient la route, ne manquant pas de sel, de piment, de punch. Pouvant aussi donner dans le dramatique, l'angoisse, voire la frayeur.
L'observation a aussi grande importance, ainsi que la précision dans la description, la conduite du scénario, l'à-propos de la chute. Les textes de Jeanne Champel Grenier possèdent toutes ces composantes et du coup, elle réussit particulièrement bien dans ce genre. D'ailleurs, deux de ses personnages débattent de la nouvelle dans un des textes. Et vous y retrouverez ce que je viens de dire.
Le mot CLAP est fort bien choisi. Le clap marque le début d'une prise de vue après que le rouge a été mis et une fois le silence établi. Ça tourne ! 38 Bobines de film nous attendent. Mais on peut prendre le mot bobine dans un autre sens : celui de portrait, avec le plus souvent une nuance péjorative. Et là, Jeanne excelle. C'est toute une galerie qu'elle montre, qu'elle sait peindre en écriture. Tous les travers possibles, tous les aspects du quotidien, tous les défauts de notre société y passent : c'est un roublard qui passe son temps à vendre son chat tout galeux à des gogos qui espèrent acquérir en même temps l'écuelle de la bête qui est une porcelaine chinoise de l'époque Ming. C'est un aspirant au mariage, complètement déçu par celle qu'il a dû trouver sur un site de rencontres et qui le reçoit dans les pires conditions. L'histoire d'un homme qui a la phobie du nombre trois. C'est l'auteur, elle - même qui se met en scène et qui rêve qu'elle est morte.
Mais je ne vais pas tout dévoiler. Je suis sûr que vous serez ravis, chers lecteurs, en reposant ce livre.
Louis Delorme
Commentaires
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- 1. Michel LAGRANGE Le 22/03/2017
Bonjour Jeanne ! J'ai commencé à picorer dans ces nouvelles, un peu au hasard ! C'est ça le charme des nouvelles, une liberté d'entrée et la surprise de nouveaux décors, de nouveaux personnages, de nouvelles couleurs ! Mais, ce qui est charmant aussi c'est de retrouver d'une nouvelle à l'autre un même regard, un même style, une même forme d'humour et de sensibilité ! Un grain de folie, du rire, de la tendresse et un style oral qui rappelle les veillées en Ardèche au coin du feu (celui qui vient de mourir !) Merci de ces promenades en pays fraternel !!! Bises ! Michel.
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